La Commission européenne organise du 7 décembre 2022 au 4 janvier 2023 une consultation publique sur le projet d’acte délégué de certification biologique du sel.
Cette étape est la dernière étape où il est possible de s’exprimer sur le projet de texte avant son adoption par la Commission européenne en février 2023 et son entrée en vigueur fin avril 2023.
L’Association Française des Producteurs de Sel marin de l’Atlantique récolté manuellement (AFPS)
ne peut ni accepter ni souscrire au texte proposé car il permettrait à de nombreuses techniques de production de sel d’être considérées comme biologiques, ignorant les principes et les objectifs du règlement biologique 2018/848 de l’UE.
Voici notre contribution à la consultation publique :
Qu’est-ce qu’un sel Bio ?
Certains pensent qu’aucun sel ne devrait pouvoir obtenir de label « Bio », puisqu’il s’agit d’un minéral. Mais l’Europe a décidé d’inclure différents types de sel « dans la mesure où ils peuvent être produits au moyen de techniques de production naturelles et où leur production contribue au développement des zones rurales » (considérant 10 du règlement UE 2018/848 applicable depuis le 1er janvier 2022).
Vu l’impossibilité de trouver un consensus sur une définition du sel Bio malgré plus d’un an de concertation avec les Etats, plusieurs acteurs ont demandé que le sel soit retiré du règlement, ce à quoi la Commission Européenne répond
« non » jusqu’à présent.
Il s’agit donc aujourd’hui de poser des limites crédibles pour que le label Bio ne soit pas présent sur des paquets de sel produits avec des pratiques
qui ne sont pas naturelles, au sens des objectifs et principes qui fondent l’ensemble de la production biologique.
Or le texte que la Commission s’apprête à adopter contient de graves renoncements ainsi que des incohérences manifestes qui auront des conséquences importantes sur la crédibilité du Bio dans son ensemble et sur les petits producteurs de sel marin. Ces derniers, qui récoltent à la main dans des marais salants, ont les pratiques les plus vertueuses en termes d’environnement, mais leur production sera considérée comme identique à celle de grands complexes d’extraction minière. La Commission s’apprête donc à créer de la confusion pour les consommateurs, là où il n’en existe actuellement pas, alors même que le label Bio a pour ambition d’éclairer les consommateurs dans leurs choix. Ceci n’est pas tolérable.
Dans le détail, 3 éléments fondamentaux que nous demandons :
- Pas de sel de mine Bio
Le premier principe général du Bio (article 5 du règlement) est de « respecter les systèmes et cycles naturels et maintenir et améliorer l’état du sol […] ».
Il est évident que l’extraction minière ne respecte aucun cycle naturel et détériore les sols et sous-sols. Considérer une pratique minière comme Bio est la même aberration que si l’on considérait le charbon comme une énergie renouvelable.
Nous demandons donc que le texte soit modifié pour rendre inéligible au Bio toute pratique d’extraction minière de sel.
- De la cohérence sur les contraintes énergétiques
Le premier objectif du Bio (article 4 du règlement) est de « contribuer à la protection de l’environnement et du climat ».
Le contexte actuel rend chacun conscient des enjeux concernant les consommations d’énergie. Mais le texte proposé par la Commission est complètement incohérent : il autorise les pratiques consistant à obtenir du sel en chauffant artificiellement de l’eau salée, sans contrainte quant à l’énergie utilisée, alors qu’il s’agit de la technique la plus énergivore. Aucune contrainte sur l’énergie n’apparaît non plus dans le processus d’extraction /transformation des sels de mine. A contrario, pour le sel de mer qui s’évapore naturellement, sans aucune dépense énergétique, la Commission impose que la phase de séchage du sel soit réalisée avec de l’énergie renouvelable. Cela n’a aucun sens écologique et crée de fait, une distorsion de concurrence, qui va affecter gravement les plus petits producteurs et contribuer ainsi non pas au « développement des zones rurales », comme se doit de le faire le Bio, mais à sa fragilisation.
Nous demandons donc : soit une obligation d’utilisation d’énergie renouvelable pour toutes les étapes de production, soit un retrait de cette obligation ciblée.
- Pas d’autorisation de dénaturer le sel
Le cinquième principe du Bio (article 5 du règlement) est de « garantir l’intégrité de la production biologique, à toutes les étapes de la production, de la transformation et de la distribution ».
Or dans le cas du sel, le lessivage du sel après récolte l’appauvrit, en lui ôtant des minéraux comme le Magnésium ou le Calcium. Cette pratique de lessivage est donc contraire aux fondamentaux du Bio. Nous demandons son interdiction.
Pour participer à la consultation publique et lire les contributions : cliquez ici
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Les documents sont en anglais. Vous trouverez leur traduction française libre ci-dessous :
. Traduction française libre du projet d’Acte délégué sur sel bio publié le 7 décembre 2022 (PDF)